26 novembre, 2006

Mission à Gourcy (3)

Vendredi 8 juillet (suite)

Après une courte -et suffocante- nuit nous prenons le petit déjeuner en compagnie de Quentin, Zoé et leurs 2 charmants enfants –Daphné et Lucien-, une petite réunion informelle est ensuite programmée. Le Maire de Gourcy et 2 autres coopérants (Un Français –Christian- et une Belge –Delphine- y prendront part). Cette réunion aura pour but de nous éclairer un tant soit peu sur la situation socio-économique du pays. Je prends quelques notes en vrac et à la volée : la monnaie en cours est le franc CFA et 1000 Francs CFA valent +/- 1,5 euros (cours de juillet 2005). Le salaire d’un ouvrier de base est de 28.000 F CFA soit quelques 45 euros mensuels. Un instituteur peut quant à lui espérer 40.000 F CFA mensuel en début de carrière et jusque 100.000 F CFA en fin de carrière. Un cadre supérieur recevrait en revanche un salaire net d’environ 250.000 FCFA, nous précise le Maire.

Les deux principaux partis politiques en présence sont l’ ADF-RDA (Alliance pour la Démocratie et la Fédération + Rassemblement Démocratique Africain) qui, selon les termes de son Président Gilbert Ouedraogo, est un parti libéral, celui des indépendances, et aussi le premier parti d’ opposition au Burkina Faso. Le deuxième parti, majoritaire, est le CDP (Congrès pour la Démocratie et le Progrès). Ce dernier, se définissant comme un parti social-démocrate, est né de la fusion de 13 partis et formations politiques diverses. Le président élu, Blaise Compaoré, appartient évidemment à cette formation de même que Dominique Ouedraogo, le Maire de Gourcy qui nous accueillera prochainement dans sa commune.
Côté agriculture, les principales ressources sont le mil, le sorgho, la mangue et le coton cultivés généralement sur de modestes parcelles appartenant à de petits propriétaires équipés d’outils rudimentaires.

En ce qui concerne la religion, plus de la moitié de la population est musulmane, 30 à 40% est catholique et le reste se partage entre les cultes protestants ou encore animiste. Au rayon des ressources naturelles, il y aurait un peu d’or dans le sous-sol. Deux barrages hydroélectriques et autant de centrales thermiques fournissent l’électricité du pays. Electricité dont à peine 15% de la population peut profiter.

A la fin de cette réunion informelle, le Maire de Gourcy s’inquiète à nouveau de n’avoir toujours pas de nouvelles de nos bagages disparus la veille. Pour tenter de nous dépanner il contacte par téléphone le tailleur de Gourcy afin qu’il nous confectionne d’urgence un costume.
Je me demande à quoi vont ressembler ces vêtements étant donné qu’il ne connaît pas notre taille et ne nous a pas mesuré !

Quoi qu’il en soit, nous décidons néanmoins de passer quelques heures dans le centre-ville afin de nous constituer un semblant de garde-robe. Dans une superette du coin, je dégotte quelques vêtements qui feront l’affaire : 2 t-shirts, 4 paires de chaussettes, 4 slips, une chemise et un pantalon, le tout pour 21.000 francs (CFA) ou 30 euros.

La ville est grouillante. Les vélos et les mobylettes sont les maîtres de la route.
Sur les trottoirs, on peut voir une multitude de petits commerces où on l’on peut tout acheter : des plats cuisinés, du charbon de bois, des pilons de poulet ou des chaînes de vélos, des casquettes de rappeurs ou des cassettes vidéos, il y des ateliers de petites mécaniques, des réparateurs de machines à coudre, des vendeurs de sucreries (limonades), de CD ou de cartes téléphoniques, j’en passe…….

Les ordures sont omniprésentes. Une odeur âcre prend parfois à la gorge. Dans ce quartier, par exemple, les égouts sont à ciel ouvert.

En début d’après-midi, un violent orage éclate . Des nuages de terres rouges sont soulevés par la tempête. On n’y voit plus rien. La circulation semble tout d’un coup paralysée. Les bâches des échoppes s’envolent. Les marchandises tombent , des fruits roulent sur le sol. Au bout d’une quinzaine de minutes et après une grosse averse, tout rentre dans l’ordre et, plus que jamais, cette odeur de terre mouillée monte à la tête.

La population est à la fois curieuse et aimable à notre égard. Les conversations s’engagent vite. Il n’y a aucune agressivité ou de racisme perceptible.

Un peu partout à travers la ville, on distingue les silhouettes des mosquées, des églises ou des temples protestants « Toutes ces religions vivent en bonne harmonie ici, nous avait dit ce matin Dominique Ouedraogo, moi même je suis catholique et ai fait une bonne partie de mes études au petit séminaire, par contre mon frère est musulman, cela n’empêche aucunement les bonnes relations avait précisé le Maire ».

Nous terminons cette brève incursion dans la capitale par le quartier dénommé « Ouaga 2000 ». Une sorte de vaste terrain vague où l’on construit à tout va, notamment des bâtiments grandiloquents imaginés par de richissimes propriétaires. Plus loin on passe devant le monument aux Héros de la Nation puis, au bout du Boulevard Kadhafi on aperçoit le palais présidentiel. Mais, visiblement le chauffeur de Quentin est mal à l’aise, il rebrousse chemin et me fait comprendre qu’il n’est pas bon de s’attarder ici et encore moins de prendre des photos du bâtiment. Il ne voudra pas nous en dire plus.

Le soir venu, nous partagerons un excellent spaghetti que Zoé nous a préparé. Nous passons le reste de la soirée dans la serre a discuter. Pendant ce temps, sur les murs, les geckos font leurs numéros d ‘équilibristes.

Je téléphone à Marie –Hélène et Pablo pour leur donner quelques nouvelles puis joue un peu avec Daphné. La fille de Quentin et Zoé va à l’école dans un lycée français. Un établissement fréquenté par des enfants de coopérants étrangers, d’hommes d’affaires ou de notables burkinabés..
« Ces derniers vivent parfois complètement en dehors de la réalité, déplore la maman de Daphné, alors que le pays connaît de graves problèmes d’approvisionnement en eau, certains parents d’élèves que nous côtoyons à l’école semblent n’avoir d’autres problèmes que de trouver un chlore de bonne qualité pour désinfecter la piscine!"

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Que des compliments de la part d'un de tes lecteurs fidèles...
- les textes sont bien écrits, sobres, informatifs, vivants... et pas trop longs.
- les photos sont très bonnes elles aussi, belles, simples, humaines, sans voyeurisme

Au fait, est-il facile de photographier dans ce pays ? Peut-on photographier les gens, en leur demandant bien sûr ?

Anonyme a dit…

Bonjour Jean,

A propos des portraits des personnes rencontrées en rue, cela n' a posé aucun problème au Burkina Faso...à condition de respecter une seule règle: établir au préalable un contact avec la personne que l'on souhaite photograpier, discuter ne fût-ce que quelques instants, se présenter, lui dire pourquoi on souhaite la photographier, etc...Des conversations qui sont autant de moments enrichissants, enthousiasmants voire singulièrement émouvants...
Bien à toi,

Bernard