29 septembre, 2007

Lima-Rio en 80 jours (8)

Ce carnet rassemble des notes et des photos prises lors d’un voyage réalisé en 1987.Il s’agit, comme le titre l’indique, d’une traversée longitudinale de l’Amérique latine ayant pris environ 3 mois (octobre, novembre, décembre) en utilisant les moyens de transports locaux les plus divers et surtout les moins coûteux : auto-stop, trains, bus, camions, barge, vélo et marche


Samedi 31 octobre (Chivay/Pérou)

Nous mettons à profit ces journées d’attente pour découvrir les environs, notamment la vallée de la Colca et Chivay. Un village perché à plus de 3600 m. d’altitude, situé à environ 140 kilomètres au nord d’Arequipa. On y accède par une route passablement défoncée à laquelle succède assez vite une piste chaotique et poussiéreuse.

Comme il n’y a de nouveau aucun espoir de trouver une place dans un bus en cette période de Toussaint nous risquons, pour la première fois de ce voyage, le « stop ».
Pas mal de camions, dit-on, partent du haut de la ville et acceptent à l’occasion, de charger l’un ou l’autre voyageur en rade.
Nous trouvons facilement un chauffeur complaisant qui nous invite à sauter dans la benne. Sept ou huit personnes y ont déjà pris place avant nous : deux familles, un militaire en permission et un brave vieil homme avec toutes ses provisions pour le mois : sacs d’oignons, farine, touries de vin, etc.…On se pousse dans la bonne humeur et nous voilà en route.
Les bruits du moteur, les gaz d’échappement et les secousses n’empêcheront en rien la conversation avec nos compagnons de voyage.

La plupart d’entre eux ont entendu parler de la Belgique, notamment à travers Eddy Merckx et surtout Jean-Marie Pfaff, gardien de but de notre équipe nationale. Il semble avoir marqué l’imagination des Péruviens lors du dernier « Mundial » à Mexico (86) et son titre de « Meilleur gardien de but de monde » décerné il y a quelques mois n’a visiblement échappé à personne !

J’avoue que cette conversation sur un sujet dont j’ignore tout me paraît surréaliste dans ce décor grandiose -presque inhumain- d’altiplano et de volcans.
C’est d’ailleurs au pied d’un de ceux-ci, le Misti, volcan aux fumerolles toujours inquiétantes, que notre véhicule va s’arrêter brutalement : un pneu vient de crever. Tout le monde descend. Certains vont se dégourdir les jambes, d’autres aideront le chauffeur à changer la roue.
Le vieil homme en profitera pour nous consulter et nous montrer son œil qui suinte d’un infâme liquide. « Cela dure depuis plus d’une semaine nous dit-il, n’avez vous rien pour me soulager un peu ? . Marie-Hélène ne trouve dans sa trousse qu’un flacon de gouttes contre la conjonctivite. Bien que nous doutions que ce remède soit adapté dans le cas présent, le vieux insiste pour qu’on lui en administre quelques gouttes dans son oeil malade. « Avec ça, je sens que ça va aller, s’exclame l’homme en repartant apaisé».

Nous avons repris la route de plus belle. L’altitude et la rareté de l’oxygène commencent à se faire sentir. Nous avons mal à la tête et la respiration devient malaisée. La nuit approche. Les rares points d’eau sont déjà couverts d’une fine pellicule de glace. Nous grelottons de tous nos membres. Sans rien dire, le soldat en permission va défaire son paquetage et en sortir une épaisse couverture qu’il posera sur nos jambes. Cela va un peu mieux.

Le soleil a presque disparu derrière les montagnes lorsque nous arrivons en vue d’une sorte de relais routier perdu dans l’immensité de la puna. Il s’agit d’une petite maison en terre séchée que rien ne distingue des autres, excepté une petite publicité pour une marque de bière locale, clouée au-dessus de la porte.
Nous nous y arrêtons le temps d’avaler un thé de coca bouillant et quelques biscuits secs, dernier réconfort avant d’arriver à Chivay, d’ici 2 ou 3 heures.

Il est environ 20h lorsque le camion s’arrêtera enfin sur la place du village. En ce moment, une panne d’électricité a plongé toute l’entité dans une obscurité complète. Curieusement, ce problème, n’affecte pas l’enthousiasme d’un groupe de musiciens qui tourne en rond sur la place en psalmodiant des mélopées en quechua tout en frappant frénétiquement sur d’énormes tambours.

Le seul établissement apparemment ouvert à cette heure est une épicerie faisant office de taverne et de restaurant. Nous nous y attablons à la lueur des bougies et d’une lampe à pétrole posée sur le comptoir.

Je ne sais si cela est dû à la relative obscurité de l’endroit ou aux ombres projetées par le rustique éclairage, mais la patronne de l’endroit semble immense. Enveloppée d’une épaisse manta et coiffée du traditionnel chapeau boule, elle s’est approchée de nous. Doucement, presque hiératique, sans un mot. Visage fin, yeux en amande et teint superbement cuivré, la commerçante nous propose son unique plat : une soupe à base de maïs.
Nous n’en demandons pas plus.

Au bout de quelques minutes, une fois habitués à la pénombre, nous apercevons dans un coin de la pièce une autre table. Deux hommes y sont occupés à vider méthodiquement leurs bières tout en observant avec une grande curiosité les moindres de nos gestes.

Nous trouvons une petite pension non loin de la place. L’hôtelier nous guidera à travers les méandres de son établissement à la lueur d’une bougie qu’il nous laissera pour la nuit. On ne saura trop à quoi ressemble cette chambre, mais tant pis, nous sommes trop fatigués par le voyage, et nous nous endormons aussitôt, sans même nous déshabiller, sur ces rudes paillasses que nous servent de lit.

Un sommeil relativement perturbé puisqu’en pleine nuit, nous sommes brutalement réveillés par des bruits -comme la démarche mal assurée d’un ivrogne heurtant les murs- et ensuite par de la lumière. Quelqu’un vient de tourner l’interrupteur et un éclairage pisseux inonde tout à coup notre chambre. D’un côté, cela signifie que le courant a été rétabli mais d’un autre, cela implique que quelqu’un est rentré dans la pièce. Or, nous ne voyons personne. Le temps de se frotter les yeux et de rassembler nos esprits, nous constatons que notre ampoule a été judicieusement placée dans une ouverture pratiquée dans la paroi séparant le couloir de la chambre. Un système économique permettant d’éclairer l’un et l’autre en même temps et avec une seule source de lumière! Chaque fois qu’un client rentrera et allumera dans le couloir, il allumera donc automatiquement dans notre chambre ! Ce à quoi l’électricien du cru n’avait peut-être pas pensé.

Dimanche 1er novembre

Journée complète dédiée à la randonnée « mixte » –à pied et en stop- jusque Yanque. Autre hameau de vallée de la Colca, perdu au milieu des cultures en terrasse et d’un paysage minéral tourmenté que survolent des condors indolents.
La marche est néanmoins rendue particulièrement pénible à cette altitude (près de 4000 mètres) et nous devons fréquemment marquer des arrêts pour reprendre notre souffle. Ce qui à l’air d’ amuser beaucoup un paysan. De sa bicyclette, il nous a fait un grand signe et nous a dépassé à toute allure dans cette côte abrupte qu’Eddy Merckx, au mieux de sa forme, n’aurait peut-être pu gravir avec autant d’aisance !
Retour en fin d’après-midi à Chivay, douche glaciale (il n’y a pas d’eau chaude) puis repos dans notre chambre dont l’ illumination restera tout au long de la nuit -et comme la veille- aussi aléatoire qu’intempestive. J’ai lu autrefois qu’il s’agissait là d’une technique de torture fort efficace que de réveiller les gens dès qu’ils s’endorment!

















(Yanque, vallée de la Colca)

25 septembre, 2007

Lima -Rio en 80 jours (7)

Ce carnet rassemble des notes et des photos prises lors d’un voyage réalisé en 1987.Il s’agit, comme le titre l’indique, d’une traversée longitudinale de l’Amérique latine ayant pris environ 3 mois (octobre, novembre, décembre) en utilisant les moyens de transports locaux les plus divers et surtout les moins coûteux : auto-stop, trains, bus, camions, barge,vélo et marche


Vendredi 30 octobre (Arequipa/Pérou)

Bien que non prévue initialement, cette étape à Arequipa augure de belles découvertes. Vue du balcon de notre chambre -que nous n’avons pas quittée depuis plus de 24 heures en raison de notre état de santé- la ville semble agréable et propre. Il en émane une impression de calme, de sérénité.
On dit pourtant que c’est d’ici que sont parties toutes les révolutions péruviennes !
Abimaël Guzman, leader du mouvement « Sentier Lumineux » est lui-même de la région (Mollendo) de même que -dans un autre registre- l’écrivain et futur candidat à la présidence, Mario Vargas Llosa (né à Arequipa en 36).

Quoiqu’il en soit -et comme notre flore intestinale semble peu à peu se remettre en place-nous prenons notre courage à deux mains et décidons de partir à la découverte de la « Ville blanche », ainsi surnommée en raison de ses nombreux édifices construits en blocs de lave très claire. Car cette ville est aussi cernée de volcans dont l’impressionnant Misti, culminant à plus de 5800 mètres.
Après un (très) léger petit-déjeuner pris dans le snack du coin – dont le patron est fort occupé ce matin à regarder un reportage sur les éléphants du Kenya !- nous entamons un circuit dans la ville : La Place d’Armes -avec ses arbres en fleurs et ses nuées d’écrivains publics- la cathédrale -avec ses deux tours- et enfin, l’incontournable couvent Santa Catalina.
Incontournable car cet ensemble architectural (dont la construction a été entamée en 1580) couvre une superficie de près de 2 hectares et est littéralement planté au cœur de la ville. Les 450 nonnes qui l’occupaient jusqu’en 1970 vivaient dans une totale réclusion, contraintes au silence absolu et abritées du tumulte ou des révolutions par les impressionnantes murailles ceinturant l’édifice. Il s’agit ni plus ni moins d’une ville dans la ville. Une véritable cité miniature coloniale –parfaitement entretenue et restaurée- avec ses places et ses cours, ses venelles et jardinets, ses ruelles labyrinthiques et impasses mystérieuses. Site d’autant plus étrange que durant les 4 siècles d’occupation religieuse de cette sorte de citadelle de la foi, un rigoureux secret concernant les activités qui s’y tenaient a été jalousement maintenu. Un black-out qui a suscité jusqu’à ce jour les plus invraisemblables commérages et ragots, les rumeurs les plus torrides !

A propos de rumeur, précisément, il en est une qui nous est parvenue avec insistance cet après-midi : il serait impossible de trouver une place dans le prochain bus à destination de Cuzco où nous avions l’intention de nous rendre dés demain. Non pas, cette fois, en raison d’attaques possibles des guérilleros mais tout simplement pour cause…de Toussaint. Tout le Pérou est sur les routes durant les jours précédant « la fête des morts », nous dit-on, et tous les moyens de transports sont réservés bien longtemps à l’avance. Les rares places restées disponibles s’arrachant à prix d’or. Arrivés à la gare routière, une file d’au moins cent personnes campant face à l’unique guichet, achève définitivement de nous convaincre.
Un homme est même venu nous accoster pour nous proposer un marché : En échange d’un solide pourboire, il accepte de faire la file pour nous, et au besoin de dormir sur place jusqu’à la réouverture du guichet demain matin !

On optera cependant pour une autre solution : la marchande de petits pains, à l’entrée de la gare est bien connue pour ses combines et surtout ses bonnes relations avec le guichetier : Moyennant quelques billets, elle promet de nous trouver 2 places à bord d’un prochain bus. Sans doute pas pour demain, ni après-demain, mais pour le jour suivant, sans aucun doute. Au bout d’une petite demi-heure d’attente, une gamine à qui la marchande a demandé d’assurer la transaction revient en souriant avec les deux précieux tickets en main. C’est « gagné ». Départ assuré dans….3 jours !





(Arequipa, couvent Santa Catalina)

24 septembre, 2007

Petite parenthèse en marge de "Lima-Rio en 80 jours"


En marge du dernier billet dans lequel j'évoque la guérilla du "Sentier Lumineux", j'ai reçu de Nuage, fidèle lecteur de ce blog (que je salue amicalement au passage!) une série de documents intéressants que j'ai tenu à intégrer dans ce journal de voyage. Il s'agit d'affiches ou de peintures murales destinées précisément à promouvoir la rébellion sendériste. Celles-ci se passent de commentaires et sont particulièrement significatives du climat de violence extrême et de terreur que ce mouvement instaurait dans les années 80 et au début des années 90....





22 septembre, 2007

Lima-Rio en 80 jours (6)

Ce carnet rassemble des notes et des photos prises lors d’un voyage réalisé en 1987.Il s’agit, comme le titre l’indique, d’une traversée longitudinale de l’Amérique latine ayant pris environ 3 mois (octobre, novembre, décembre) en utilisant les moyens de transports locaux les plus divers et surtout les moins coûteux : auto-stop, trains, bus, camions, barge,vélo et marche...


Mercredi 28 et jeudi 29 octobre (Arequipa/Pérou)

Journée épuisante passée à de multiples tractations dans une demi-douzaine d’agences de bus Nous supposions qu’il serait facile de réserver nos places pour Cuzco, la prochaine étape que nous avions envisagée. Sur la carte, en effet, une route, apparemment directe, unit cette ville à celle de Nazca.
Dans la première agence, un employé nous informe cependant qu’il n’y aura pas de bus avant plusieurs jours, voire plusieurs semaines ! Dans la seconde, nous apprenons qu’un pont a été emporté par les eaux et que la liaison est momentanément interrompue. Une autre officine annonce directement par voie d’affiche qu’elle a suspendu jusqu’à nouvel ordre ses voyages en direction du « Centre du Monde » (Cuzco, en langue quechua, signifie le nombril, allusion à la position centrale de Cuzco lorsque cette cité était la capitale de l’empire Inca).
C’est finalement par un passant que nous apprenons la véritable raison de cette impossibilité d’emprunter la route directe vers Cuzco.
Pour y accéder, il faut en effet traverser une partie de la province d’Ayacucho, le fief de la guérilla maoïste « Sentier Lumineux » dirigée par le mystérieux et insaisissable Abimaël Guzman (petite photo à droite/photo AFP). Le groupe est puissamment armé et violent et depuis plusieurs années, tente de renverser le gouvernement en place. Les attaques qu’il mène sont de plus en plus audacieuses et l’on apprend qu’il y a peu de temps, ils ont même réussi un tir de roquette en direction du parlement à Lima.
Dans les campagnes, les villages et la jungle des contreforts andins, ces guérilleros intégristes adoptent aussi une véritable politique de la terre brûlée et s’attaquent avec une cruauté exceptionnelle à tous ceux qui, de près ou de loin, représentent à leurs yeux les symboles du pouvoir. Qu’ils soit financier, politique, culturel ou intellectuel. C’est ainsi que curés, instituteurs ou maires sont régulièrement assassinés sans autre forme de procès. Il y a quelques jours encore, nous avons lu dans un journal local qu’un bus avait été stoppé par un commando sendériste sous l’unique prétexte qu’il transportait des touristes occidentaux, fatalement inféodés à l’idéologie capitaliste ! Les deux malheureux voyageurs qui s'y trouvaient ont aussitôt été extraits du véhicule puis abattus d’une balle dans la tête.
Décidément, la zone où ces rebelles ont décidé d’établir leur quartier général est bien nommée : Ayacucho signifie en quechua « La ville des morts » ou, selon les traductions « La ville du sang ». Pour atteindre Cuzco, nous serons dés lors contraints à un énorme détour via la ville d’Arequipa et de là, nous remonterons vers le nord-est en train jusqu’à l’ ancienne capitale Inca.
Nous embarquons donc ce soir à bord d’un bus archi-bondé pour un voyage nocturne d’une dizaine d’heures. Comme il n’y a plus de place dans les soutes pour les bagages, nous avons coincé tant bien que mal nos sacs à dos sous nos pieds. Ce qui rendra notre position des plus inconfortables puisque nous avons les genoux qui touchent pratiquement le menton. Comble de malchance, la cebiche (plat de poissons crus marinés dans de la coriandre et du jus de citron) que nous avons mangée juste avant le trajet n’est guère appréciée par notre estomac. Dès le départ nous sommes pris d’épouvantables crampes abdominales qui ne tarderont pas à se transformer en une diarrhée apocalyptique. Notre salut viendra de la grande piété du chauffeur et de ses passagers. Tout au long du trajet, les petites chapelles dressées le long de la route seront autant de prétextes pour s’arrêter et y réciter une prière. Nous mettrons ces haltes providentielles à profit et pendant que les dévots s’en iront déposer leur offrande, nous irons soulager nos viscères. Au risque de se faire mordre par des meutes de chiens littéralement enragés.
Nous arrivons dans la matinée à Arequipa, complètement démolis. Nous nous engouffrons dans la première pension venue pourvue de salle de bain privée.
On s'écroulera sur les lits jusqu’au surlendemain en nous gavant de pastilles de charbon de bois, paraît-il recommandées en cas de problème intestinaux. Bien efficace, mis à part que nos dents sont devenues complètement noires. Une vraie collection de chicots, en apparence. J’ai d’ailleurs bien vu que mon sourire « édenté » avait un peu effrayé l’épicière du coin lorsque je suis allé lui acheter des bouteilles d’eau !






(Arequipa)

21 septembre, 2007

Lima-Rio en 80 jours (5)

Ce carnet rassemble des notes et des photos prises lors d’un voyage réalisé en 1987.Il s’agit, comme le titre l’indique, d’une traversée longitudinale de l’Amérique latine ayant pris environ 3 mois (octobre, novembre, décembre) en utilisant les moyens de transports locaux les plus divers et surtout les moins coûteux : auto-stop, trains, bus, camions, barge,vélo et marche...

Mardi 27 octobre (Nazca/Pérou)

Comme convenu la veille, l’associé de notre hôtelier nous embarque dès l’aube pour une visite guidée des environs. Au programme : les incontournables géoglyphes de Nazca. Nous n’avons pas pu nous payer l’avionnette pour survoler le site –idéal mais hors de prix !- alors nous le visiterons en voiture.
Tant pis.
Après tout, Maria Reiche confiait lors de sa conférence qu’elle avait effectué l’ ensemble de ses observations du haut d’un escabeau ! Nous découvrirons donc le site à bord de la Dodge millésimée d’Armando, notre guide du jour. Son véhicule vaut déjà le détour et constitue en soi une véritable relique digne d’attention. Le compteur affiche au moins 5 tours du monde, la carrosserie a été repeinte au moins autant de fois (au pinceau !) et s’il y a pas mal de jeu dans la direction, ce n’est pas très grave: « Dans le désert, c’est toujours tout droit, dixit Armando ! »
Au bout d’une demi-heure de route -direction plein nord- nous aboutissons au sommet d’un promontoire d’où une série de dessins enchevêtrés et de lignes apparaissent de manière précise. On peut y reconnaître une algue, un singe mais aussi une sorte d’humanoïde agenouillé dans une posture évoquant la prière ou l’incantation.
Motifs s’étalant chacun sur des centaines de mètres carrés et ce, sans la moindre distorsion ni erreur de perspective (photo). Là, résident précisément tout l’art et le mystère des Nazcas. Armando déplore cependant l’inconscience de certains touristes qui ne craignent pas de piétiner voire de rouler sur le site en 4x4, détruisant et brouillant ainsi irrémédiablement les lignes et les dessins millénaires.
L’après-midi sera consacrée à la visite d’une série de sites peut-être moins impressionnants mais tout aussi intéressants. Comme cette singulière oasis irriguée par un réseau de canaux construits, eux aussi, par les Nazcas. Ces canaux sous terrains -creusés à une profondeur de 8 à 10 mètres- sont accessibles par une série d’ouvertures en spirale pratiquées à intervalle régulier. Ouvertures destinées à y puiser l’eau mais aussi à l’entretien des canaux où coule, dit-on, une eau d’ une pureté incomparable.
L’ensemble de cette infrastructure est toujours opérationnel aujourd’hui et est utilisé par les agriculteurs de la zone pour irriguer, notamment, les champs de coton. Une variété dont les fleurs ont ici, en cette saison une belle teinte jaune ou orange (blanche aux Etats Unis) . Leur récolte serait surtout destinée au marché européen et tout particulièrement anglais.
Le retour à Nazca, en fin d’après midi, s’effectuera moyennant un dernier détour via Chauchilla. Un lieu assez perturbant puisqu’il recèle sur plusieurs kilomètres carrés une vaste nécropole Nazca dont, hélas, les ultimes vestiges (ossements, momies, tissus, bandelettes, etc…) gisent lamentablement sur le sol, dépouillés des ornements qui les accompagnaient vraisemblablement. Conséquence de pillages et de « recherches archéologiques » sans scrupule. Pendant près d’une heure, nous déambulons ainsi au milieu de squelettes (dont certains sont dans un état de conservation remarquable), de crânes (portant parfois encore leurs cheveux) et de membres (sur lesquels des lambeaux de peau séchée adhèrent encore). J’ en arrive à me demander si les truands de l’endroit ne profitent pas de ce singulier cimetière à ciel ouvert pour y « mêler » adroitement quelques corps fraîchement trucidés.
La scène n’en est que plus inquiétante en cette lumière rougeoyante de fin de journée.
Nous regagnons Nazca un peu perturbés par ces images à la lisière du cauchemardesque lorsque, soudain, le véhicule d’Armando est stoppé par un convoi carnavalesque. C’est la fête à Nazca !
Parmi les groupements en costumes traditionnels, un attire plus particulièrement notre attention : les membres de cette société sont déguisés en Schtroumfs ! Petits shorts blancs sur pantys bleus, tuniques bleues et bonnets blancs, excepté le meneur, évidemment, exhibant le couvre-chef rouge du grand Schtroumf. Pas de doute possible, il s’agit bien des célèbres personnages de Peyo. Fiers, voire un peu chauvins, nous expliquons à notre guide l’origine « belge » de ces accoutrements. « Pas du tout, nous rétorque Armando, ce sont des costumes inspirés de ceux portés par nos lointains ancêtres pré-colombiens ! » Il faudra absolument en parler à Peyo dès notre retour au pays !




(Cimetière de Chauchilla,Nazca)


16 septembre, 2007

Lima-Rio en 80 jours (4)

Ce carnet rassemble des notes et des photos prises lors d’un voyage réalisé en 1987.Il s’agit, comme le titre l’indique, d’une traversée longitudinale de l’Amérique latine ayant pris environ 3 mois (octobre, novembre, décembre) en utilisant les moyens de transports locaux les plus divers et surtout les moins coûteux : auto-stop, trains, bus, camions, barge,vélo et marche...


Lundi 26 octobre (vers Nazca)
(Dans les faubourgs de Nazca)
Nouvelle tranche de voyage, en direction de Nazca.
Le bus indique une capacité de 49 places assises. Elles sont toutes occupées mais il y a autant de monde debout dans le couloir central. Malgré la foule, un contrôleur parviendra à se frayer un chemin à grand coup d’épaule et de coude pour examiner un à un les tickets des passagers et au besoin faire payer les fraudeurs. A mi-parcours la plupart des voyageurs descende. Ce sont des étudiants, tous vêtus d'un bel uniforme bleu.
Nous parvenons enfin à nous asseoir et à contempler un paysage qui s’est sensiblement modifié depuis notre départ de Pisco. Les premiers contreforts des Andes apparaissent, la route devient sinueuse et quelques corniches en surplomb donnent déjà de belles émotions. Je comprend pourquoi le chauffeur a fait le signe de croix avant de démarrer. Sous son nez, en guise d’assurance complémentaire, une image de la vierge se balance au gré des chaos.
Il est midi lorsque nous arrivons à Nazca. La chaleur est sèche et suffocante.
A l’Hôtel Nazca (ce n’est pas très original) le patron nous propose une chambre correcte ainsi que des excursions que son associé organise chaque matin. Nous concluons le marché et acceptons de partir dès demain vers les fameux signes gravés sur le sol par la civilisation Nazca.
Dînons en ville en compagnie d’un jeune californien. Celui-ci nous raconte ses mésaventures depuis son arrivée au Pérou. Notamment celle qui lui a valu d’être dépouillé de tous ses bagages dès le premier jour à l’aéroport de Lima « Une attaque surprise dans les toilettes de l’aéroport par trois individus armés de cutter, dit-il, je n’ai rien pu faire, tout s’est déroulé en moins d’une minute, ajoutera encore l’américain, sans jamais se départir d’un large sourire ».

Le soir venu nous nous donnons rendez-vous à l’hôtel « Turistas ». C’est dans les salons de cet établissement que chaque soir la célèbre archéologue-mathématicienne allemande Maria Reiche donne une conférence sur l’œuvre de sa vie : le décryptage des mystérieux signes de Nazca –les géoglyphes- que d’aucuns continuent par ailleurs à attribuer à une civilisation extraterrestre !
Cette étonnante personnalité vit depuis de nombreuses années à Nazca dans cet hôtel. Un appartement lui a d’ailleurs été alloué à vie par le gouvernement péruvien en récompense des services qu'elle a rendus au pays en faisant connaître au monde entier la culture Nazca.
En fonction de la nationalité des touristes venus l’écouter, Maria Reiche donne son exposé en anglais, en allemand, en français ou en espagnol. Cette fois, le public –une cinquantaine de personnes ce soir- sera majoritairement anglophone et l’ archéologue s’exprimera donc en anglais. Dès son entrée dans le grand salon, les conversations vont s’arrêter. Il faut dire que, malgré sa petite taille et sa démarche hésitante (elle doit avoir plus de 80 ans) et ses cheveux blancs, la dame impressionne. En raison des longues heures passées à travailler sous l’infernal soleil, elle est de surcroît pratiquement aveugle et c’est sa sœur qui l’aide à gravir les marches du petit podium d’où elle va s’adresser au public. Sa voix est très faible, et bien qu’amplifié par un micro (défaillant), son commentaire est difficilement perceptible. On comprend cependant que, selon sa théorie, les dessins, les signes et les lignes gigantesques –parfois plusieurs kilomètres de long- parcourant le désert alentour auraient notamment une vocation de calendrier. Par exemple, lorsqu’un astre, une étoile ou une constellation se trouve dans le prolongement de telle ou telle ligne, il est temps d’entamer telle ou telle tâche agricole, etc…La technique utilisée pour tracer ces signes semble quant à elle assez simple : Le sol, dans cette région est constitué de sable clair recouvert d’une couche de cailloux rendus foncés grâce à l’oxyde de fer. En raclant cette première couche apparaît ainsi le sable plus clair et dans la foulée, les motifs dessinés.
Si ces "gravures" sont toujours visibles aujourd’hui après autant de siècles (la civilisation Nazca s’est développée entre –300 av. J.-C. et 800 de notre ère), cela est dû au climat particulier dont jouit la région : absence quasi totale de vent et sécheresse extrême –à peine quelques millimètres d’eau par an-. Aujourd’hui encore, si l’on trace une ligne sur ce sol, il y a de fortes chances que dans un millénaire, celle-ci apparaisse toujours !






(Maria Reiche, photo: Revista International El Colibri)

15 septembre, 2007

Lima-Rio en 80 jours (3)

Ce carnet rassemble des notes et des photos prises lors d’un voyage réalisé en 1987.Il s’agit, comme le titre l’indique, d’une traversée longitudinale de l’Amérique latine ayant pris environ 3 mois (octobre, novembre, décembre) en utilisant les moyens de transports locaux les plus divers et surtout les moins coûteux : auto-stop, trains, bus, camions, barge,vélo et marche...

Dimanche 25 octobre (Pisco/Pérou)

Une journée dans le sable !
Direction Paracas, juste pour le plaisir de se « perdre » dans le désert –ou de s’en donner l’illusion- .
Un bus part de la place à 8 heures.
Les maraîchers s’y activent déjà depuis belle lurette.
Des fruits, de la volaille, des onguents, des plantes médicinales, des patates douces, des épices, du parfum…
Le bus démarre dans un tonnerre d’enfer.
Poussière, odeur de gasoil, bruit de ferraille.
Une petite demi-heure de route et nous voilà face à l’hôtel « Paracas ».
Un des plus luxueux de la région paraît-il.
Nous y rentrons pour demander à l’accueil un carte de randonnées.
La réceptionniste nous remet une photocopie chiffonnée, à peine lisible.
Ca n’a pas l’air très fiable, mais nous risquons malgré tout un petit circuit. Celui menant au musée Julius C. Tello : « Une référence pour tout qui veut connaître la civilisation Paracas » est-il indiqué sur le papier.
En avant pour le musée.
Le balisage s’avère boiteux dès le départ !
Nous errons pendant une heure sur une piste improbable et perdons vite l’hôtel de vue, seul point de repère fiable dans cette mer de dunes nimbées de grisaille matinale..
Marie-Hélène a beau retourner notre guide et la « carte » en tous sens : nous sommes perdus. Pas la moindre trace du fameux musée.
Dans le lointain, nous avons aperçu une VW –couleur sable- immobilisée au milieu de la dune et deux personnes à proximité.
Nous nous en approchons, peut-être pourront-ils nous donner quelques informations.
Il s’agit d’un couple en villégiature originaire de Lima, Walter et Lilian. Ils sont aussi à la recherche du fameux musée. Nous décidons d’unir nos efforts et finissons, après maints détours, et deux ensablements par débusquer un édifice un peu miteux surmonté d’une pancarte « Museo Julius C. Tello ».
L’endroit est poussiéreux et d’un didactisme un peu suranné. Le « conservateur » du musée nous laisse errer dans les salles sans même prendre garde à nous ni nous surveiller. Il y a pourtant quelques belles pièces avec entre autres cette momie Paracas (civilisation établie ici entre –600 et –300 avant J.C.) ainsi que quelques beaux spécimens de tissages colorés aux motifs géométriques complexes.
Nous poursuivons notre découverte des environs avec Walter et Lilian qui nous font profiter de leur véhicule, notamment jusqu’à un mirador surplombant l’océan et en contrebas duquel se prélasse une famille loups de mer. Dans le ciel, quelques condors semblent ne rien perdre de la scène.
Sur la route du retour, le couple nous invite à prendre un verre à l’Hôtel Paracas où ils sont descendus pour le week-end. Les prix de cet établissement semblent pourtant inabordables : L’affiche à l’entrée indique 1000 intis la nuit pour une chambre double. « C’est la moitié d’un salaire moyen au Pérou, nous dit Walter » et d’ajouter : « Nous sommes propriétaires d’un commerce de luminaires et de matériel électrique dans le centre de Lima et cette année a été assez bonne pour nous, c’est pourquoi nous nous offrons cette petite folie en amoureux »
Au bord de la piscine les apéritifs se succèdent à un rythme d’enfer et nous commençons tout doucement à « dériver ». Notre espagnol n’est pas assez suffisant que pour comprendre la totalité du long monologue qu’à entamé Walter et maintenant tout se mélange dans notre esprit : les réformes ( ?) du président Alan Garcia, le racisme (à l’égard des péruviens natifs), le coût de la vie, la difficulté de trouver un travail, etc…
Lorsque nous voulons aborder le problème de la guérilla marxiste initiée par le « Sentier Lumineux » sévissant dans certaines régions du pays, notre compagnon se ferme brutalement. « Je préfère ne pas parler de ce sujet ici, lâche-t-il sèchement en guise de point final à cette conversation ».
Nous reprenons le chemin de Pisco à bord d’un minibus en faisant toutefois une halte à San Andres où nous dînons d’un steak de tortue (une fois de plus, mais il n’y pas le choix).
Cette fois tout chavire. Le fracas des vagues sur la plage, le vol des pélicans rasant les flots, les chaises bleues du resto et ces rais de lumière filtrés par une mince toiture en bambou.

Au mur est épinglé un avertissement un peu surréaliste à l’attention de la clientèle : « Consommateurs, si vous découvrez dans les plats, des insectes ou quelqu’ autres corps étrangers dans votre nourriture vous êtes instamment priés d’en avertir le service d’hygiène de la province….. »

08 septembre, 2007

Lima-Rio en 80 jours (2)


Ce carnet rassemble des notes et des photos prises lors d’un voyage réalisé en 1987.Il s’agit, comme le titre l’indique, d’une traversée longitudinale de l’Amérique latine ayant pris environ 3 mois (octobre, novembre, décembre) en utilisant les moyens de transports locaux les plus divers et surtout les moins coûteux : auto-stop, trains, bus, camions, barge,vélo et marche...



Vendredi 23 octobre. (Lima-Pisco/Pérou)

Le jour se lève sur Lima.
En fait, il serait plus juste de dire la grisaille. La grisaille et le désespoir.
Par la fenêtre on aperçoit des édifices misérables aux murs lépreux, des immondices jonchant le sol et des égouts refoulant leur trop plein de miasmes.
La nuit aura malgré tout été paisible et nos angoisses de la veille se sont un peu dissipées.
Nous abandonnons cependant l’idée de visiter Lima, envisagée avant notre départ : Trop de tristesse, de pauvreté, voire d’agressivité et de mépris. Du moins à l’égard des touristes.
En espérant que le « climat » soit plus serein en province, nous décidons d’entamer notre périple vers le sud en prévoyant de nous arrêter ça et là au gré des villages côtiers.
A la centrale des bus « Ormeño », où nous avons réservé nos places pour Pisco, nous sommes hélés par un gaillard à la mise singulière. Il s’agit d’un touriste australien, affalé sur le sol, l’air désespéré. Ses bagages, rassemblés autour de lui, ont été solidement arrimés aux passants de sa ceinture par d’épais filins d’acier. « Soyez prudents, nous dit-il, On a déjà tenté de me dévaliser trois fois cette semaine. Regardez à quoi j’en suis réduis, ajoute-t-il encore, en nous montrant le système un peu absurde qu’il a mis au point pour éviter les vols ! ».
Une fois dans le bus, l’ambiance est plus joyeuse et bon enfant.
Nous sommes installés à l’arrière du véhicule et échangeons quelques mots avec une famille assise à côté de nous. Nous partageons des bonbons et des cigarettes, les enfants s’installent sur nos genoux et les parents plaisantent. Ils s’amusent en voyant nos mines consternées lorsque nous traversons l’épouvantable banlieue liméniene et que nous essuyons les quolibets des passants lancés à notre attention à travers la vitre ouverte : Gringos par-ci, americanos par-là, etc…

(Dans les rues de Lima)

Lorsqu’ apparaît l’employé chargé du contrôle des billets, un petit vent de panique va de surcroît s’installer: Nous avons perdu nos tickets ! Nous avons beau retourner nos poches, ils sont introuvables.
L’employé joue un moment les préoccupés, mais d’humeur taquine, il se ravise aussitôt et nous lance : « Et bien, en compensation, vous me donnerez votre stylo, celui qui dépasse de votre poche….ainsi nous serons quittes ». La transaction effectuée le contrôleur repartira visiblement ravi de sa nouvelle acquisition.
A l’ extérieur, le paysage s’est rapidement modifié. Dès les faubourgs de la capitale dépassés, de larges bandes de sable apparaissent et préfigurent une région totalement désertique que nous n’allons pas tarder à traverser.
Le trajet est entrecoupé de plusieurs haltes (Chincha, Cañete,...). Des arrêts mis à profit par des nuées de petits vendeurs de sucreries et de « comestibles » . Fanta, Coca, Inca Cola, etc… que l’on doit s’empresser de boire au plus vite car les vidanges doivent être aussitôt récupérées. C’est un sport que d’ingurgiter ces boissons d’un trait d’autant que ces bouteilles ont une contenance d’ un demi-litre.


Nous arrivons dans la petite ville de Pisco après 4 heures de voyage. Ici, il fait bon vivre, semble-t-il : Rues aux bâtiments relativement bien entretenus, vaste place vivante et colorée -avec son marché quotidien- et, en son centre, une impressionnante statue équestre de San Martin. Il y a encore quelques hôtels au style vaguement colonial bordant le front de mer ainsi qu’une agréable promenade le long de l’océan. Une ambiance assez paisible et décontractée émane des lieux. Nous comptons rester ici 2 ou 3 jours. L’endroit est recommandé pour partir à la découverte des îles Ballestas, à quelques encablures de la ville.
Ce sera notre projet pour demain.


(Hôtel à Pisco)


Samedi 24 octobre

Levés à 7 heures, petit-déjeuner puis microbus jusqu’à l’embarcadère de Paracas d’où les propriétaires d’embarcations emmènent régulièrement les touristes vers les îles Ballestas. Un pêcheur accepte de nous embarquer moyennant quelques Intis (monnaie péruvienne)
L’excursion va durer environ 3 heures à bord d’une petite barque à moteur.
Nous sortons rapidement de la baie et passons d’abord en vue du fameux Candélabre. Une impressionnante œuvre rupestre gravée par les Paracas (entre –600 et –300 av. J.-C.) à flanc de dunes. On dit de ce dessin qu’il fut autrefois un point de repère utile pour les cap-horniers voguant vers les mers australes.

Les îles Ballestas apparaissent enfin. Il s’agit d’un sanctuaire pour la faune telle que loups de mer, manchots mais aussi cormorans, pélicans, pétrels, martins-pêcheurs dont ces petites îles sont littéralement surpeuplées.

Ce matin, le ballet des martins-pêcheurs est particulièrement impressionnant lorsque ceux-ci, tout autour de nous, piquent en vrille et s’enfoncent plusieurs mètres sous les flots pour attraper les poissons. Notre guide improvisé nous explique qu’une à deux fois par an, les îles sont accostées par des ouvriers venus de tous les coins de Pérou pour participer à la récolte du guano.
Pour l’instant les seuls locataires des lieux sont de volumineux lions de mers. Ils se prélassent au milieu de leur harem en poussant à l’occasion quelques gueulantes bien senties.
Pendant ce temps, quelques dauphins et manchots accomplissent des acrobaties autour de notre embarcation.

Retour à Pisco.

Deux gars nous ont « invité » dans un resto qu’il disent réputé pour sa cuisine typique. Au menu, un seul plat : tortue grillée (!), pommes-vapeur et salade. Pour l’apéro, pas d’alternative …du Pisco, évidemment. Outre le fait que nos deux lascars sont visiblement des rabatteurs au service du restaurateur, ceux-ci se montrent également pressant pour connaître l’ état de notre « fortune ». Si nous acceptions de changer nos dollars avec eux, disent-ils, nous obtiendrions bien plus de monnaies locales que dans une banque dûment accréditée. Nous refusons…et les deux « cambistes » de disparaître aussitôt en grommelant quelques insultes.

Passons une partie de l’après-midi et de la soirée à parcourir la petite ville et à nous perdre dans le dédale des échoppes du marché. Nous nous faisons tirer le portrait –au pied de la statue de San Martin- par un photographe au procédé rustique : vieille chambre technique en bois et développement sur place dans une boîte à l’abri de la lumière. Le résultat est un peu pâlot, mais ça fonctionne.

(Photographe à Pisco)